J118 – lundi 27 mars – Stung Treng / Kampong Phnow

Réveillé aux aurores vu qu’une baie vitrée de ma chambre ne possédait pas de rideaux. Je me prépare et descends dans le hall en faisant bien gaffe de n’avoir rien oublié. Je n’ai pas envie de me retaper les 4 étages à remonter.

Arrivé dans le hall, je tombe sur le proprio au visage défiguré. Il a une méchante balafre qui lui barre toute la partie droite de la figure. Il a envie de taper la causette de bon matin. Et aussi la générosité de m’offrir quelques mangues pas assez mûres hélas. Je vais les conserver en espérant qu’elles jaunissent un peu. A 6h30, je quitte cette guesthouse qui ne restera pas dans les annales.

Avant de quitter la ville, je vais faire un tour au marché pour éventuellement y déjeuner mais surtout pour y acheter un régime de bananes. Il est 6h30, le soleil commence à pointer le bout de son nez. C’est déjà blindé de monde.

Cependant, de voir de gros morceaux de bidoche et de poiscaille découpés à même le sol, ne me donne pas envie de déjeuner ici. Je n’ai pas osé prendre une photo de peur de vous faire gerber. Mais ‘est-ce vrai que vous n’avez plus l’image. Suis-je bête ! Par contre, j’insére une photo du marché aux fruit et légumes qui est quand même moins rebutant.

D’ailleurs, en regardant cette photo (j’insiste lourdement), vous constaterez comme quoi que cette femme, tout de jaune vêtu, semble être en pyjama. Je n’en ai pas encore parlé mais cela m’avait frappé en arrivant au Cambodge. De nombreuses femmes s’habillent de cette façon certainement pour être plus à l’aise dans des vêtements amples. Mais cela donne vraiment l’impression qu’elles sortent du lit. C’est assez étonnant. Je sors de la ville en logeant le Mékong. Une gargote sise au pied du fleuve attire mon attention. Elle donne sur l’immense pont que j’ai emprunté hier pour traverser le fleuve. Je m’y arrête déjeuner. Ce matin, ce sera soupe à la viande. Je dois avouer que j’ai un peu de mal avec la bidoche ce matin. Mais, comme d’hab’, je finis ma gamelle.

Je repars. J’ai décidé de descendre le Mékong en le suivant rive gauche. Le problème est que la route n’est pas continue. Je vais devoir reprendre la route n°7 à un moment. Cette route n°7 est aussi nommée AH11 pour Asia Highway 11. Elle relie les 2 capitales Vientiane (Laos) à Phnom Penh. Cependant, Jacques me disait hier soir que la partie empruntée entre la frontière laotienne et Stung Treng était une méchante piste tôlée de 100kms. Bonjour la Highway. Je verrais bien comment elle est. De mon côté, je suis agréablement surpris de tomber sur une belle petite route cimentée suivant le fleuve.

La vue est splendide. Elle me rappelle ma majestueuse Loire natale avec son côté sauvage, ses îles, ses forts et dangereux courants, ses plages de sable, sa végétation luxuriante. De plus, de petits potagers sont plantés tout le long de cette route. Ils doivent alimenter le marché de ce matin. Un peu de verdure dans ce monde de brutes fait du bien à l’âme et à la rétine.

Hélas à 3 kms du village de Siem Bouk où je dois bifurquer, la route se transforme en piste. La maréchaussée aurait quand même pu aller jusqu’à ce village.

Dans le village, je tourne à gauche. La route retrouve son béton. Si je continue tout droit, la piste suit un long moment le fleuve mais pour tomber dans un cul de sac. Je traverse, comme hier, de nombreuses plantations d’anacardiers. De belles demeures contrastent avec les cabanes des récoltants. Je rejoins la fameuse route AH11. C’est une route bilatérale mal bitumée. La circulation est plutôt calme. En traversant les villages, je remarque aussi que de nombreuses femmes sont voilées. Je suis en effet dans une enclave musulmane. La vue d’une mosquée me le confirme.

C’est d’ailleurs dans ce village que je m’arrête prendre mon café glacé matinal. Je commençais à désespérer. Je roule un long moment sur cet axe. Comme hier, j’enchaîne de longs faux plats montants avec de longues descentes toujours vent dans le pif. Au moins, cela a l’avantage de m’aérer. Vers midi, je fais un arrêt buffet dans le hameau non répertorié de O Krieng. Ce midi, ce sera riz-légumes (vraiment pas envie de viande) suivi d’un dessert déjà pris en Thaïlande. C’est une salade de fruits (litchee, mangues, …) et d’autres morceaux gélatineux servis avec dans de la glace pilée et une crème. Délicieux et rafraîchissant.

A la sortie du village, je m’arrête dans le temple bouddhiste pour y trouver une plateforme où siester. Un moine m’invite à rentrer dans le bâtiment derrière le temple principal. De jeunes moines y dorment sur des nattes. Je m’installe à côté d’eux. Et pique un gros roupillon avec Bouddha comme ange gardien. Il est 13h passé. J’ai encore de la route à tracer. J’aimerais me rapprocher du fleuve. Je salue les jeunes moines alors qu’ils reprennent leurs lectures sacrées.

Comme tous les jours depuis un long moment, le redémarrage est toujours aussi difficile. Le soleil plombe à nouveau. La route n’a rien d’affriolant hormis que le bitume est de meilleure qualité. Les villages sans charme sont de plus en plus espacés. Il faut que je me méfie avec l’eau qui part si vite. J’achète dorénavant de grandes bouteilles que je répartis dans ma gourde et dans une bouteille de 50cl mise au « frais » dans une de mes sacoches. Comme repère, j’ai 2 rivières (presque à sec) à franchir avant de bifurquer à droite pour revenir vers le fleuve. Dans le dernier village traversé, je me bois un nouveau café glacé. Les choses vont se corser. Je prends donc à droite sur une piste. C’est parti pour 17kms.

Je traverse de grandes plantations voire des friches brûlées. Je croise de rares scooters. Il y a même une famille qui vit dans une cabane au milieu des bois. Ce n’est à nouveau pas plat. J’enchaîne montées et descentes en faisant gaffe à mes pneus. Au bout de qq kms, je rejoins une piste en latérite un peu plus praticable.

Après avoir raté l’embranchement qui menait au fleuve, perturbé par un engin de chantier en train de manœuvrer derrière une usine implantée au milieu de nulle part, je jardine un peu à travers champs. Mais je finis par y arriver. Je tombe sur une famille de pêcheurs ne parlant évidemment pas un mot d’anglais. Ils vivent dans des baraques construites de bric et de broc. Le chef de famille me montre ses filets et me mime qu’il pêche surtout de petits poissons. Ils doivent encore se demander ce qu’un Barang (l’équivalant du Farang thaï) peut bien faire dans ce coin paumé. J’immortalise la petite famille.

Mais avant cela, je vais faire un plouf dans le Mékong. La température est agréable. Par contre, il y a beaucoup de courant. Je fais gaffe. Je me fais quelques longueurs tout habillé (short cycliste et maillot). Le pied ! Cela faisait de nombreux kms que j’en rêvais.

Comme la famille est assez nombreuse, je ne vais pas taper l’incruste. Je reprends la piste qui longe le fleuve à une centaine de mètres. Très rapidement, je repère une cabane abandonnée sur le côté de la piste. Je vais inspecter. Ce sera parfait pour ce soir. Cela faisait un bail que je n’avais plus squatté de lieux improbables.

Par contre, je n’ai ni douche, ni fan, ni air cond. Et, ce soir au menu, ce sera régime banane. J’ai pris cette bonne habitude d’acheter un régime de petites bananes le matin. De plus, le prix est dérisoire (0,50$). Au niveau voisinage, il y a quelques baraques pas très loin. De temps à autre, un scooter passe. Je salue le conducteur. Il me salue. Quelques fois, il s’arrête pour discuter le bout de gras. Mais vraiment aucun sentiment d’insécurité. Je ne suis (hélas) pas dans une manif en France ! A 18h00, le soleil se couche déjà. Un promeneur solitaire passe à ce moment-là. Il me fait un petit signe amical en me montrant le soleil rougeoyant.

Après une de mes plus longues journée à vélo (113kms), je vais aller rejoindre mon sac à viande (décidément) posé sur mon matelas gonflable. Le plus proche hébergement se situait à 27 kms au sud. Beaucoup trop loin après cette longue journée. Il est 19h15. Je suis assis à écrire, ce qui physiquement n’est pas l’exercice le plus dur, et je suis en nage. Vivement que la fraîcheur arrive. Bonne nuit les petits …

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