J120 – mercredi 29 mars – Kratie / Stueng Trang

Ce matin, je mets le réveil à sonner à 6h du mat’. Vu que la chambre est borgne et moi sourd (ou tout du moins sous boules Quiès la nuit), mieux vaut prévoir. Après une bonne nuit avec mon ventilo au plafond, je quitte ce charmant hôtel à 6h30. J’ai oublié de vous préciser que le nom de l’hôtel vient du fait qu’il y aurait encore à peine une centaine de dauphins (le dauphin ou l’orcelle de l’Irrawaddy) présents dans le Mékong. Je n’en ai, hélas, pas vu la queue d’un seul.

Comme je n’ai plus de banane en réserve et que j’ai faim, je m’arrête en ville pour y déjeuner. Je commande du riz avec une soupe aux légumes sans viande, ni poisson, ni nouille. Comme la prise de commande est toujours aussi compliquée, ma soupe est servie avec des nouilles. Une fois que j’ai avalé tout cela, je vais pouvoir rouler tranquille.

Une fois les réservoirs bien rechargés, je reprends la route avec toujours cet entrain matinal et cette soif de rencontres et de découvertes. C’est plutôt bon signe. Dans le cas contraire, cela devient compliqué. De plus, suite au violent orage d’hier soir, le ciel est voilé sur le Mékong en ce 70è jour de périple asiatique. Si cela pouvait rester comme cela, ça me va parfaitement.

Pour sortir de la ville, j’emprunte la route 308. La circulation y est plus dense que d’habitude notamment avec les personnes qui viennent bosser en ville. M’enfin, ce n’est pas la rocade toulousaine non plus … Mais, très rapidement, je bifurque à droite pour prendre un chemin parallèle beaucoup plus sympatoche. Je traverse le village de Chhloung (avec deux h pour mieux scier le bois). La rue principale est effervescente avec les gamin.es qui rentrent à l’école.

Cette rue principale est très étroite. Heureusement, il n’y a que des scooters et des vélos qui l’empruntent. Je suis à nouveau dans une enclave musulmane. Comme cette jeune femme, beaucoup porte le hidjab.

Je continue mon p’tit bonhomme de chemin en le suivant justement. Les baraques jouent à touche-touche. Les zones non habitées se font rares. Je sers les fesses avant de trouver un endroit tranquille pour faire ma crotte matinale. A ce sujet, je fais remarquer à mes enfants que cela fait un bail que je n’ai plus évoqué ma pause cacafé. Je dois aussi avouer qu’il y a rarement des toilettes dans les endroits où je me pose.

J’adore ces endroits en dehors du tumulte tout relatif. D’ailleurs, alors que nous ne sommes qu’en milieu de matinée, cet homme a l’air de l’apprécier aussi. Elle est pas belle la vie ?

De temps en temps, j’aime aussi m’arrêter dans un de ces temples bouddhistes. Même si j’en ai déjà visité des dizaines, je trouve que chaque temple a un charme particulier. Celui-ci a la particularité d’avoir une coursive sous la toiture.

Après cette pause zen, je poursuis mon chemin sur une mono-trace. Le ciel est toujours voilé. La température reste clémente alors que nous sommes déjà en milieu de matinée. Par contre, je n’ai toujours pas trouvé de kiosque à café.

Alors que je me rapproche du fleuve pour essayer d’en trouver un dans le village de Peak Chamlak, j’aperçois un embarcadère en contrebas. Un chemin y accède. Quelques scooters me doublent et accélèrent pour le prendre. Comme je suis revenu sur la route bitumée 308, je fais comme eux. Je descends la pente et embarque le dernier dans le traversier. C’est une de mes grandes spécialités.

Seules quelques voitures, dont une grosse noire aux vitres teintées avec chauffeur, ont embarqué. Il n’y a que des scooters. Mon arrivée ne passe pas inaperçue. Je profite de cette pause pour acheter un sachet de fruits à la marchande ambulante. Je pense que ce sont des litchees vu la consistance mais c’est plus amer. Le traversier peine à remonter le courant alors que nous croisons devant une île. Vers 10h30, nous débarquons dans le village de Prek Prasab.

Je finis enfin par dégoter un kiosque à café. Je passe ma commande. Un homme, assis à une table au fond avec sa fille, m’invite à la passer en français pour qu’il la traduise en khmer. Il parle effectivement très bien français. De fait, il est guide dans les temples d’Angkor. Il se nomme Titia (« Comme Laëtitia » me dit-il) et sa fille, âgée de 3 ans, a le doux prénom de Sophialine, qui sonne un peu comme celui de ma fille Gwendoline. C’est sa sœur, dont je n’ai pas compris le prénom, qui tient ce kiosque. A propos des fruits achetés sur le traversier, j’apprends qu’il s’agit de fruits d’un palmier. Par contre, il faut complètement les éplucher avant de les manger. Ce que je n’ai pas fait ce matin mais ce qu’elle fait pour moi. Effectivement, c’est moins amer. A ce sujet, Aiew, la compagne thaï de mon oncle Dédé, a trouvé le nom du fameux fruit thaïlandais. Il s’agit d’un mayongchid.

Pour en revenir à Titia, il m’apprend qu’il est actuellement en pause vu qu’il fait trop chaud à Siem Reap et, de ce fait, les touristes ne sont pas assez nombreux notamment l’après-midi. Je confirme. Il reprendra vers la mi-avril. Sa femme est infirmière à l’hôpital du coin. Il est obligé de vivre seul pour son boulot ne rentrant que de temps en temps ici. Il me confirme aussi que les russes, implantés massivement à Sihanoukville puis délogés et remplacés par des chinois ne sont pas du tout estimés ici, comme en Thaïlande d’ailleurs. Nous restons également un long moment à discuter de politique française et cambodgienne (j’essaierais de vous faire un topo). Bien qu’il ne soit jamais allé en France, il se tient informé de l’actualité. Passionnant et impressionnant. Après une heure de pause, je dois reprendre ma route. Sa sœur lui demande de nous prendre en photo. Je quitte cette charmante famille à regret. Vers 11h30, je repars sur mes chemins de traverse.

Les réservoirs sont sur la réserve après ma progression depuis ce matin. Par contre, je n’ai pas envie de me poser dans une gargote. Quelques kms plus loin, j’ai la chance de tomber sur cette vendeuse à la sauvette. Elle fait cuire des chaussons de riz à la banane. Parfait pour ce midi. J’en commande deux pour la modique somme de 1000KHR. Mais je patiente un petit moment avant qu’il ne soit cuit à point. Je profite de cette attente pour photographier toute la petite famille.

Mes petits chaussons sont brûlants. Je roule encore un moment en cherchant un coin sympa pour les déguster. Je repère un temple. Clignotant à gauche. Je m’y rends. Je trouve une plateforme ombragée où me poser. Par contre, je n’ai pas vu que ce temple se trouve en face un lycée. De nombreux ados y font aussi leur pause déjeuner. Evidemment, certains viennent taper la causette. Et, vu l’accoutrement des garçons, on « discute » foot. Je leur fais chanter la chanson « Liverpool, Liverpool ! ». Et, évidemment, cela se termine en séance photo réciproque. Puis je récupère mon estrade pour y siester.

Il ne me reste plus qu’un semi-marathon avant d’arriver au terme de cette étape, en l’occurrence, la petite ville de Strueng Trang. C’est le seul endroit où il y a quelques hébergements. La route pour y mener est très calme. Par contre, je ne longe pas, comme ce matin, le fleuve. Des champs de maïs et d’autres céréales y poussent. Par contre, avant d’arriver, je dois grimper un sacré mur pour franchir la falaise qui plonge dans le fleuve. Vers 14h30, je m’arrête dans le premier guesthouse trouvé à l’entrée de la ville. Je prends à nouveau une chambre avec ventilo amplement suffisant. Après ma douche et ma lessive, je descends en ville à la recherche d’en endroit sympa pour me poser. Comme souvent, le côté touristique n’est pas mis en valeur sur ce fleuve.

Ni terrasse, ni café ne se trouve le long de la belle esplanade bordant le Mékong. Cependant, j’en trouve une de l’autre côté à l’intersection avec la rue montante. C’est un peu bruyant et dangereux (un accident est évité de peu après qu’un scooter a coupé le virage) mais la vue n’est pas mal quand même. D’ailleurs, en parlant d’accident, je me pose à la table à côté d’un ghost bike. Mais ici c’est une coïncidence. Ces vélos blancs sont, dans de nombreuses villes européennes, un mémorial posé à l’emplacement où un accident mortel (ou très grave) a eu lieu avec un engin motorisé.

Après cette digression morbide, je paie l’addition et pars à la recherche d’une gargote où diner. Il est bientôt 18h00 et le soleil ne va pas tarder à aller se coucher. Moi également ! Finalement, ce sera du take away. En effet, je m’aperçois que ma loupiote arrière a disparu. Déjà que celle de l’avant a disparu pendant un transfert à ferry, je ne préfère pas prendre le risque de circuler de nuit sans lumière. D’autant plus avec l’épisode du Ghost Bike. Ont-elles été « empruntées » ? Sont-elles tombées à cause des secousses ? Je n’en sais rien mais il faudra que je rachète un autre éclairage. Je rentre donc dîner dans ma chambre après avoir récupéré une cannette Ganzberg gratis. Celle-ci ne me rapportera qu’un « Thank you ».

Fin de cette nouvelle très belle journée. Je me rapproche de la capitale cambodgienne avant de filer vers le Vietnam et Ho Chin Min City (ex Saïgon) où je vais essayer de retrouver mon vienne collègue Marie-Pierre et son mari Frédéric, perdu de vue depuis une vingtaine d’années …

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