Je suis réveillé au son des chevaux qui galopent sur la plage. Il y a pire comme réveil matin. Je m’extraie difficilement de mon duvet bien chaud, m’habille et sors de la tente. Le ciel est encore bien gris. Il fait un froid de gueux. Je plie la tente puis parcours à nouveau le chemin sablonneux. Je me tape ensuite 2,5kms à travers de mauvais sentiers et de nombreux parcs à chevaux. J’arrive en périphérie et m’arrête dans le premier café venu pour prendre « un cafe grande y una pasteria a la crema » en guise de p’tit déj. Et surtout pour me réchauffer les doigts. Je vais devoir sortir mes gants d’hiver. Il caille vraiment !

Je discute avec le patron du bar avec mes quelques réminiscences d’espagnol que j’avais appris en cours du soir avant de rejoindre Hélène, la mère de notre fils Titouan, au Costa-Rica. Les infos défilent à la TV et elles ne sont pas très bonnes. De nouvelles restrictions sont annoncées en Euskadi (j’en sors) et la situation a l’air de se détériorer. Il me faut reprendre la route vers l’ouest. En sortant du café, j’emprunte à nouveau un sentier après avoir traversé une usine dont les salariés Bosch font le piquet de grève. Malheureusement le sentier est vite défoncé par des engins forestiers. J’avance péniblement en essayant de suivre la trace du tracteur.

Alors que j’allais rejoindre une route bitumée, je tomber nez-à-nez avec le responsable de ce massacre d’eucalyptus. Le chemin est barré et je dois attendre que le conducteur de l’engin le dégage. Je dois dire que je suis impressionné par la dextérité du gars. On dirait une main avec 2 doigts mécaniques qui coupe les troncs, enlève l’écorce, arrache les arbres comme des fétus de paille et prends des poignées de branches pour les balancer plus loin. Impressionnant ! Je pense à la forêt amazonienne qui doit subir le même triste sort.

Une fois dégagée, je continue mon petit bonhomme de chemin et traverse un Parque Natural. Avant de l’emprunter, j’admire la baie de Laredo et Santona et aperçois la forêt d’eucalyptus (au fond à droite) où j’ai passé la nuit.

Puis je m’enfonce à nouveau dans les terres par de charmantes routes. Le paysage est bucolique. Les formes se sont arrondies. Je peux grimper les collines sur la plaque du milieu. Et, coïncidence, je tombe sur une des auberges de St-Jacques où nous avions passé une soirée et une nuitée fort agréable. Je discute avec la patronne qui me confirme que l’auberge est ouverte contrairement à beaucoup d’autres. Je dois dire que je n’ai vu qu’un couple de pèlerins depuis la frontière.

La route serpente ensuite vers la mer et rejoint le port d’El Astillero. Le ciel a aussi déchiré le voile gris et le bleu réapparaît à nouveau. Enfin un peu de soleil pour me réchauffer la couenne ! Il est bientôt 13 heures. J’ai les crocs. Je repère un restau ouvrier à l’entrée de la ville. Je m’y arrête pour déjeuner : calamars/riz en entrée, anchois (la spécialité du coin) grillés avec des pdt et flan en dessert; le tout accompagné d’un verre de blanc. Quel bonheur de poser son cul sur une chaise et de se faire servir !!!
Le ventre bien rempli, il me faut reprendre la route. Je branche la musique et écoute Renaud. Une de ses chansons évoquent Guernica. A ce sujet, je rends à Picasso sa fresque ! Je profite aussi de cette occasion pour la dédier à Jean-Philippe de notre liste ECOSOL. Il vient de publier une BD sur la Retirada dont je ne me souviens plus du titre. J’en profite également pour saluer tous mes ami.es de la liste. Avec encore une pensée bien sûr pour Marie-Pierre. La route est toujours aussi agréable. Le vent s’est fortement levé et me pousse dans le dos. A la sorite de Barreda, un bon tape-cul m’oblige à repasser petite plaque pour arriver à l’hôpital perché sur la colline. Je suis sur la crête et aperçois au loin le Pico de Europe enneigé.

Quelques cyclistes me doublent en m’encourageant. Je pense aussi à mes potes du Stade Toulousain qui vont être cloués demain et ne pourront sortir à vélo (à moins que Jean-Luc ne concocte un circuit de 10kms en boucle !). Bon courage les gars et les championnes Cathy, Françoise et Céline. Je vous embrasse bien fort et pense à vous (surtout à Thierry et à nos « gros » !) quand j’en chie dans les bosses … Je poursuis ma route et profite des paysages avec le beau temps revenu.

La mer est à l’horizon et j’espère pouvoir trouver un camping ou un bivouac à proximité. Après m’être arrêté dans un village faire quelques emplettes et également une pause banane/schweppes, j’arrive à Comillas. À l’entrée de cette petite station balnéaire se trouve un camping mais il est fermé. J’explore les emplacements en front de mer d’où je prends la photo. La vue est superbe mais c’est beaucoup trop venté. Ça souffle en tempête.

Je décide de longer la côte, aperçois une bâtisse énorme (monastère, couvent ?) et finis par dénicher mon bonheur.

Une petite cabane est nichée à flan de colline en bas d’un champ. Elle est à l’abri du vent. Ce sera parfait pour cette nuit. Par contre, en rentrant mon vélo à l’intérieur, j’accroche une ronce à mon cuissard Castelli. Je serai bon pour un peu de couture. C’est certainement le prix à payer pour la nuitée ! Je dîne au soleil, dos à la cabane et bien protégé du vent, avec vue imprenable sur le Pico de Europa et l’océan. A défaut de regarder le match Bayern-PSG, j’admire le splendide coucher de soleil. A choisir …

Je pense que c’est pour ces moments-là que je repars à l’aventure et que j’endure des passages plus pénibles. Même si la solitude est parfois pesante, j’ai fait ce choix et je l’assume. D’ailleurs, Carmina m’a envoyé un très beau texte à ce sujet et je la remercie. N’hésitez-pas d’ailleurs à m’envoyer des messages sur Whatapps, cela me fera énormément plaisir de vous lire à mon tour ! Sur ce, il fait frisquet. Le vent est tombé. Je vais me coucher.
Résumé : 105kms, 5h55, 18km/h, bivouac