Réveillé dès potron-jacquet vers 5h du mat’ par le chant des oiseaux, je traîne un peu et ne plie les gaules qu’à 7h30. Il fait déjà chaud. Le camping d’à côté semble toujours aussi désert. Comme ce village de bout du monde d’ailleurs. J’immortalise une dernière fois l’île de Kasos avant de prendre un chemin pour sortir de Fanari.

Coup de bol, je tombe sur un cerisier. C’est la razzia. Je prends quelques réserves au cas où … Je prends des chemins incertains entre lac et mer. Quelques lidos profitent d’emplacements idylliques en bordure de plage de sable blanc. Mais il n’y a personne. Je n’ai croisé que quelques véhicules immatriculés en Bulgarie (BG) et quelques grecs. J’espère pour les propriétaires qu’il y a plus de monde en été …

Depuis Fanari, 5 grands lacs se succèdent d’ouest en est. Malheureusement, le chemin ne permet pas de suivre la côte. Je suis à nouveau obligé de prendre dans les terres pour les contourner. Je tombe à nouveau dans les mêmes paysages qu’hier et avec le même vent qui s’est levé. Cependant, je remarque des remorques contenant des restes de coton. Je n’en avais pas vu hier.

Je prends mon mal en patience. De toute façon, je n’ai pas le choix. J’avance tranquillement vent dans le nez, sous le soleil, à travers d’immenses cultures céréalières et fruticoles (kiwis, amandiers, …). Puis, j’arrive devant la rivière Lissos que je vais devoir franchir à gué. Le revêtement m’a l’air bien glissant. J’assure en poussant le vélo pieds dans l’eau.

A J’arrive dans le bourg de Imeros construit « à l’américaine » : « avenues » et rues taillées au cordeau. Je m’arrête prendre ma café et remplir mes gourdes au seul café de ce bourg paysan. Une camionnette de la société Wheel (Rehabilitation Products) se gare. Laurel & Hardy en descendent. Tous les deux vétus d’un tee-shirt noir, ils s’installent à la terrasse après avoir salué tout le monde. D’autres tables sont occupées par des retraités ou des paysans de passage qui, comme moi, font une pause café frappé. De plus, ce café fait aussi office de magasin. Autant dire que je vois passer du monde par rapport à ma route solitaire.

10h30. Je reprends ma route pour retrouver le bord de mer à Ampelakia. Je longe ces plages désertes en montant et descendant sur la route 7301a. A Kryoneri, je me pose, enfile mon maillot de bain et vais me faire un plouf. J’ai la plage pour moi tout seul. Et même une douche en sortant. A défaut d’une séance de cryothérapie, c’est une bonne séance d’alternance entre eau chaude et eau froide. Mais quel bonheur !!! Et, ensuite, je me mange une poignée de cerises avant de repartir.

Je me mange aussi pas mal de vent. Je continue ainsi jusqu’au bout de la route à Platanitis. Puis, je prends à gauche toute et droit devant, vent dans le pif. Je dois à nouveau grimper dans la montagne avant de basculer une dernière fois sur la mer côte grecque. Je monte tout à gauche à 6km/h.

Arrivé à Maroneia, je me retourne une dernière fois pour admirer cet immense delta où j’en ai bien bavé quand même.

Il est 13h30. Je regarde mes cartes et décide de m’arrêter déjeuner dans ce village. Après je vais devoir faire le tour de ce mont et je ne sais pas le temps que cela va me prendre, ni si je vais trouver quelque chose d’ouvert de l’autre côté. Je trouve une taverna à l’ombre de deux magnifiques platanes. Le menu sera le même qu’hier mais 40% plus cher. Va comprendre Charles ! Je sors du village et me trouve un banc à l’ombre d’une chapelle pour siester 30’ max.

Et me voilà reparti en montée, toujours en plein cagnard et vent de face. Je me traine à 6 ou 7km/h. Mais, comme le disait fort justement La Fontaine dans la fable le Lion et le Rat : « Patience et longueur de temps. Font plus que force ni que rage ». Donc j’avance tranquillement. Au village de Krovili, je suis interpellé par un conducteur grec avec sa femme et sa fille qui me demande si c’est bien la route de Maroneia. C’est le monde à l’envers ! Je croise ensuite un berger avec ses moutons et ses nombreux chiens. Je m’arrête au cas où. Je ne croiserais plus personne jusqu’à la mer.
Alors que je me trouve sur un plateau, je pense apercevoir au loin de nombreuses crottes de bique sur la route. J’arrive dessus mais les crottes s’envolent ! Putain … le soleil tape vraiment fort ou c’est la bière qui était frelatée ? En fait de crottes, ce sont des milliers de sauterelles volantes. Hallucinant voire angoissant. J’essaie bien de les éviter comme je le fais avec de nombreux insectes. Mais c’est impossible. J’en écrase. D’autres se prennent dans les rayons. De plus, je pense que c’est la période de reproduction. Ça fornique à tous les étages. Cela dure pendant des centaines de mètres. Cela me fait penser aux Dix plaies d’Egypte. Je sors enfin de cette zone macabre. Je passe sous le Rock Somota et entame la descente.

Je retrouve enfin la mer et une petite crique et son Beach Bar difficilement accessible. En effet, à part la route dont je viens, il n’y a qu’un chemin pour retrouver des villages côtiers. Chemin que j’emprunte évidemment.

Puis, après avoir contourné cette pointe, je tombe (si je puis dire) sur le site archéologique de Zone qui est en bord de mer. Il y a un temple dédié à Apollon mais ne subsiste hélas que les bases.

Je continue mes pérégrinations sur la route logeant la mer. Je suis obligé de remonter au village de Dikella pour faire quelques emplettes puis de redescendre en bord de mer. Je jardine quelque peu pour contourner l’imposant monastère de Koimisi Theotokou. J’arrive à Panorama où ce sont des lidos qui se côtoient le long de cette belle plage. Je m’y arrête, repère un emplacement dans un parking d’un lido fermé, renfile mon maillot de bain et vais me faire un dernier plouf avant d’établir mon bivouac. Encore une ô combien rude mais belle journée de cyclotourisme.

Demain soir, si tout va bien, je devrais être en Turquie. Je suis en effet à une soixantaine de kms de la frontière.
Résumé : 90kms, 6h35, 13,7km/h, chaud, bivouac