En ce 60è jour de périple, la journée commence mal. Je me suis réveillé à 2 heures du mat’ et ce fût compliqué de me rendormir après. J’ai quand même pu admirer la lune qui tente de briller en plein centre de l’image et les lumières sur la ville. Enfin surtout sur le complexe pétro-chimique …

Et, évidemment, je me suis rendormi au moment de me lever. Donc je plie les gaules vers 7h sans avoir déjeuné. Je vais descendre en ville pour trouver une table. Le ciel est couvert ce matin.

Une fois descendu en ville, je dois aussi retirer de l’argent. Je trouve un distributeur mais le solde de ma carte Revolut n’est pas suffisant et, comme je n’ai pas de réseau, je verrais plus tard. Je trouve un parc avec tables et bancs dans une résidence. Au moment de déjeuner, je m’aperçois que j’ai perdu mon sac contenant mon pain, certainement mal accroché à mon antivol. Voilà ce que c’est que de partir la tête dans le cul !
Je pars en direction d’Izmir mais sans passer par la route D550. Je suis l’itinéraire cycliste de mon GPS. En sortant de la ville, je prends à droite et me retrouve devant un poste de contrôle. Je m’arrête et demande si je peux passer. C’est l’entrée des cités pour les travailleurs de la zone pétrolière. Le gars de la sécurité Securitas ne rigole pas. Il me demande mon passeport, rentre dans sa cabine, revient et me dit d’attendre. J’attends. Je regarde mes cartes et vois que je peux récupérer la route un peu plus haut. Je lui annonce que je pars mais il me fait comprendre d’attendre, que la police arrive. Au bout d’un gros quart d’heure, un véhicule banalisé arrive. A son bord, trois hommes pas très souriants. J’ai droit à un contrôle en règle avant qu’ils ne me laissent repartir … par la route que j’avais repérée. Elle commence vraiment bien cette journée !

Je contourne donc cette immense cité pour me retrouver derrière la montagne, dans la zone de frêt. Quel bordel ! C’est un incessant va-et-vient de poids-lourds qui livrent ou chargent des contenairs. J’ai l’impression d’être un intrus au milieu d’une fourmilière de mastodontes.

Arrivé derrière la zone portuaire, je tombe sur le marquage de l’Eurovélo8. Incroyable !!! Mais quelle idée de faire passer cet axe par ici ?

Au premier village traversé, je m’arrête pour boire un çay bien mérité. Puis je reprends ma petite route à travers monts et merveilles. Je traverse notamment le village de Kozbeyli avec ses rues pavées, son café, ses paysans qui s’arrêtent boire leur çay, ses trottoirs défoncés et son minaret dominant l’ensemble.

Après avoir passé ces monts, je descends dans la plaine où le vent s’est levé. Il vient de la mer et je l’ai à nouveau dans le nez. Je traverse des cultures céréalières et de grandes exploitations de vaches laitières.
Alors que je traverse le village de Gerenköy, j’aperçois une pâtisserie sur ma droite. Je m’y arrête. A peine entré, le patron me parle en français. Je n’ai pourtant pas de drapeau tricolore sur le vélo. Je lui commande un gâteau et commence à discuter. Sa femme arrive. Elle me propose un çay et de m’asseoir à une petite table. Elle s’appelle Amle (Espoir en arabe) et est originaire d’Alger. Lui se nomme Ali et il est turc. Ils ont vécu très longtemps à Alger où ils avaient une entreprise de fabrique de pinces à linge et une boutique. Mais, entre le Covid et son grave problème de santé au coeur, ils ont dû partir et se sont installés ici.

On discute un long moment. J’apprends d’ailleurs que beaucoup de syriens (officiellement 3 millions) sont installés en Turquie. Ils y travaillent dans les champs et les chantiers. Mais il me faut repartir. Et pas les mains vides d’ailleurs. Amle me prépare un sac empli de gâteaux salés et sucrés. Merci à tous les deux pour votre chaleureux accueil.
Il est toujours difficile de reprendre sa route après de telles rencontres mais, comme je l’ai déjà dit, cela fait aussi partie du voyage. Je continue donc mon chemin vers la ville mirage d’Izmir. Dans la campagne, je tombe sur des arbres à mûres. Je fais une razzia. Puis je file jusqu’au village de Seyrek. Je m’arrête dans une boucherie-restaurant pour y déjeuner de köfte et d’une belle salade de crudités.

Je repars vent dans le nez. Ça souffle fort dans cette immense plaine. Un cycliste avec cales à lacets et short à l’ancienne me double sans que je comprenne ce qu’il me dit au passage. A 15kms d’Izmir, j’emprunte une magnifique piste cyclable bleue. Au loin, sur les coteaux pelés, poussent des résidences banlieusardes.

Je contourne l’aéroport militaire puis longe des marais où des flamands roses flamandent rosement. Et je finis par arriver dans cette immense ville implantée sur tout le fond de la baie au pied des montagnes. De mon côté, ce ne sont que des immeubles modernes sans intérêt.

Je me dirige vers l’embarcadère pour passer directement sur l’autre rive. Après quelques péripéties pour trouver un distributeur avec ma CB « secrète » et acheter ma carte de 3 passages (pas facile quand tout est écrit en turc !), j’embarque et débarque de l’autre côté de la baie vers 16h00. Je m’active car que je n’ai pas trop envie de me trouver bloqué en plein centre-ville comme hier soir.

Je pars donc à la pêche à la wifi. J’essaie dans un bar de plage (dont les serveurs n’en ont rien à battre), dans le bar de la Marina (dont les clients huppés et yachtisés me regardent bizarrement), dans un lounge (dont le serveur m’offre le çay vu que ça ne fonctionne pas), je ne trouve pas (ou on ne veut pas me faire trouver ?). Tant pis. J’essaierais de joindre Adrien demain.
Je file sur la route D300 très empruntée coincée entre la mer d’un côté, séparé par un parapet de béton, et l’autoroute de l’autre. Aucune chance de trouver un bivouac. Puis cette route traverse Nardilere, composé de quartiers en enfilade le long de la côte. Si je veux sortir de là, j’ai encore 15kms à faire soit une bonne heure ou, comme hier, partir dans la montagne. Il est un peu tard. En passant devant un premier hôtel, je me dis que c’est la solution. Je m’arrête mais il est complet. Je continue un peu plus loin et tombe sur le Lizbon Otel. Deuxième essai. C’est OK pour une belle chambre donnant sur la montagne négociée à 700LT (39€). Je vais pouvoir prendre une bonne douche, laver mon linge, me poser et dormir dans un bon lit. Pour la Wi-fi, je comprends qu’il y a une panne sur le secteur. Ceci explique cela.

Résumé : 85kms, 5h50, 14,6km/h, couvert/chaud venté, hôtel