Après une bonne nuit de sommeil sous la pinède, je prends mon temps ce matin en ce 70è jour de ce périple. Je plie le bivouac pour être à 7h45 à l’entrée du parc et du site de Termessos. Je me donne jusqu’à 9 heures pour trouver une voiture qui monte sur le site à 9 bornes de l’entrée. Une 1ère voiture avec chauffeur et un couple japonais masqué : raté. Une seconde avec une famille et deux jeunes filles derrière : raté. Une 3ème avec 4 jeunes à l’intérieur : encore raté. Il est 9h. Je tombe les sacoches et attaque la montée. Sans les sacoches, j’ai l’impression de voler. Ça grimpe à 6 à 7% à travers la forêt. Je roule à gauche pour profiter de l’ombre car il fait déjà chaud.
A 4 kms du parking, j’aperçois au loin un coureur … qui s’avère être une traileuse. J’arrive à sa hauteur et entame la discussion. Super. Elle parle aussi bien anglais que moi. Elle se nomme Hosram, prépare le Trail Salomon de Cappadoce et est coach sportif. Je monte à son bon rythme à 9km/h environ. Je l’accompagne jusqu’au parking où une de ses élèves l’attend. On se fait tirer le portrait avant que chacun ne reprenne ses activités.

Je dépose mon vélo devant le kiosque du gardien et attaque la montée à pied sur un chemin montagnard. Comment nos ancêtres ont-ils pu bâtir une ville ici ? Après avoir dépassé les murs de la ville basse, j’arrive à la ville haute. Il n’y a presque aucun visiteur. Pourtant l’entrée n’est que de 15TL (à peine 1€).

Je poursuis ma visite en suivant le cheminement pour arriver jusqu’au théâtre. Et là, c’est l’apothéose : c’est l’un des plus beaux monuments archéologiques que je n’ai jamais vu. Ce site antique aurait été bâti 1.000 AV JC. Il se situe dans les montagnes de Taurus à 1.000m d’altitude. Les blocs de pierre sont ajustés les uns par rapport aux autres avec un système de chevilles et de trous percés dans chaque bloc, mais sans mortier. La tribune, sur la photo ci-dessous, repose sur un mur en aplomb. C’est vraiment impressionnant. Il est fort dommage qu’un tremblement de terre ait endommagé ce site.


Je passe ma matinée à m’y balader avant de redescendre sur Terre à pied puis à vélo. J’ai filmé le panorama du théâtre que je publierais sur FB. Amazing !!! Une fois arrivé à l’entrée principale, je recharge mes sacoches et reprends mes chemins de traverse à travers la campagne. Je m’arrête voir cet édifice qui me semble être une citerne d’eau au vu de la profondeur à l’intérieur … mais elle est vide.

Puis je fais ma pause çay dans le village d’Ayanlar. Un homme s’installe à ma table et commence à discuter en anglais. C’est un farmer d’une cinquantaine d’années. Il parle turc évidemment mais aussi anglais, allemand, turc et un peu italien ! On discute un long moment d’autant plus qu’ il est passionné d’archéologie. Il me parle de ce site qui aurait accueilli jusqu’à 2.400 habitants. Il me dit également que, comme les égyptiens, c’était une civilisation très évoluée qui la construit et qu’ils devaient avoir des techniques de construction inconnues de nous. Il me parle aussi de sa ferme, de ses moutons et de ses machines. J’imagine que c’est le patron et que ses ouvriers travaillent. Et qu’il aimerait bien partir aussi en vadrouille … mais en caravane.
Je le quitte et repars jusqu’à la ville suivante, ou plutôt le dernier quartier nord d’Antalya, pour y déjeuner toujours dans une boulangerie-café. Les gâteaux y sont colorés, chocolatés et fort appétissants.

A la sortie de cette banlieue, je remarque un panneau Kuaförü. Je m’y rends et me fais couper les tifs et élaguer la barbe. Aucun des 2 coiffeurs ne parlant anglais, il n’est pas évident de demander au mien (en tee-shirt noir) ce que je veux. Je mime sa coupe et sa barbe et qu’il se débrouille. Par contre, avec les autres clients, ils ont l’air de bien de s’amuser à mes dépens.

En repartant, j’ai l’impression d’être aussi léger que mon destrier devait se sentir ce matin. A la sortie de cette banlieue, je passe entre l’hippodrome et la prison d’Antalya. J’ai toujours une pensée pour les personnes emprisonnées alors que je circule libre comme l’air. Je traverse ensuite un immense plateau ceinturé par ces montagnes de Taurus. Je vais de bourgade rurale en bourgade rurale. Je m’arrête dans l’une d’elles pour une pause çay et recharge des bidons à un point d’eau réfrigéré. La terrasse du café est à nouveau bondée de joueurs de dominos. Pourtant, nous sommes lundi, il est 16h et tous ne sont pas à la retraite. Faudra qu’on m’explique. Vous remarquerez le monsieur à droite tenant dans sa main un komboloï jaune comme en Grèce.

Après pas de mal de journées à circuler sur de grands axes fort empruntés et de longer des stations balnéaires, je retrouve enfin ce plaisir intense de rouler sur de petites routes de campagne, écouter et sentir la nature, saluer les personnes croisées, retrouver un rythme apaisant et « à paysan », entendre le muezzin lancer l’appel à la prière. D’ailleurs, il est 17h et c’est ce qui se passe au moment où je longe ce village à flanc de montagne.

Je quitte en effet ce plateau pour escalader un petit col et basculer dans une autre vallée. Je me dirige vers Isparta plus au nord. Et, comme c’est aussi l’heure du bivouac, je sors mes radars. En descendant le col, j’emprunte un chemin forestier qui mène à une maisonnette … et à un beau terre-plein venté et ombragé. Parfait pour la soirée.

A ce sujet, j’ai beaucoup de questions concernant les emplacements de mes bivouacs. En ce qui me concerne et quand je peux évidemment, j’évite les zones habitées (au moins 2 kms) pour ne pas être dérangé par les habitants, les zones humides par les moustiques, les zones de pâturage par les mouches, les zones routières par le bruit. Quand je peux trouver, comme ce soir, un emplacement venté, ombragé, avec une vue sympa, c’est parfait.
Résumé : 60kms, 4h00, 15km/h, chaud, bivouac