En ce matin du 1er avril, un poisson ne va pas me faire frétiller du tout. En effet, alors que je suis réveillé dès potron-minet dans mon dortoir climatisé, je patiente avant de me lever. J’ai prévu d’aller visiter le Musée du Génocide ouvrant à 8h00. Après m’être préparé, je suis interpellé par une personne à l’accueil qui m’apprend que mon lit n’a été réservé que pour une seule nuit au lieu de deux. Et que tout est complet ce week-end. Je dois donc trouver une solution de repli d’ici midi. Je pars à pied au Musée et je verrai après. « Tout se fera ». A 8h00, je suis le premier à franchir le portillon d’accès à cet ancien lycée de Tuol Sleng.

Ce lycée, appelé aussi S-21 pour Prison de Sécurité 21, fait partie d’un réseau de plus de 200 prisons disséminées à travers le Cambodge par les Khmers Rouges entre 1975 et 1979. Dans celle-ci, le nombre de prisonniers est estimé entre 15.000 et 20.000 (dont 79 étrangers). Ils furent tous recensés, torturés puis assassinés dans ce centre de détention. Seuls 200 en seraient ressortis vivants dont 7 seulement au moment de la découverte de ce sinistre lieu par les vietnamiens. Les 14 tombes blanches à l’entrée du site commémorent les 14 dernières victimes brûlées et non identifiées de ce génocide avant que leurs geôliers ne prennent la fuite.

A l’entrée, un audio-guide et un plan permettent de mieux saisir la folie de ce régime totalitaire en cheminant à travers les salles des classes de ce lycée transformées en cellules et en chambres de torture. Je dois avouer que, plus d’une fois, les larmes me sont montées aux yeux en écoutant les épouvantables récits et en découvrant l’innommable. Comment rester insensible devant une telle barbarie ?

Dans plusieurs salles, les photos des personnes exécutées, qui n’ont pas été détruites à l’arrivée de l’armée vietnamienne, sont exposées. Dans ces pièces, les traces de béton marquaient l’emplacement d’une cellule avec 1 ou 2 prisonniers attachés fer aux pieds.

A l’intérieur du Bâtiment C, encore couvert des barbelés d’époque, …

… les cellules sont toujours intactes. Seules des structures métalliques ont été posées pour les consolider.

Pour mieux surveiller les prisonniers, des trouées ont été percées entre les anciennes classes.

Au second étage, ces cellules sont construites en bois.

Dans d’autres salles, des instruments de torture ont été reconstitués. Les peintures réalisées par Vann Nath, un des rares survivants, sont également exposées. Mais les images sont parfois insoutenables. Il me semble, mais je n’en suis pas certain, avoir vu un reportage à la TV sur cette prison. C’était un des rescapés qui menait la visite. A confirmer …

Dans la cour de cet ancien lycée, un mémorial a été érigé. Sur des plaques noires, sont gravés en lettres d’or les noms des suppliciés encore présents dans les registres non détruits. Un monument rappelle en plusieurs langues : « Nous n’oublierons jamais les crimes commis sous le régime du Kampouchéa démocratique ». Et moi, je n’oublierais jamais cette visite. Si vous passez un jour à Phnom Penh, il faut venir ici pour se rappeler de la barbarie humaine.

Pendant cette sombre période d’à peine 4 ans, un quart de la population cambodgienne a disparu soit exécutée dans ces prisons, soit morte au travail intensif dans les champs demandé par le sanguinaire Pol Pot, soit tuée sous les bombes américaines qui déversèrent plus de bombes sur ce pays que pendant la 2nde guerre mondiale. Pour de plus amples infos, vous pouvez consulter cet article dont je me suis inspiré : Musée du Génocide
Après ce terrible choc, je me retrouve à l’air libre. La vie continue de s’écouler en dehors de ces murs chargés de cette sombre histoire. Il me faut dorénavant trouver un autre hébergement pour ce soir. J’arrive à retrouver le post de Nico qui parlait de cette ville. Je ne suis qu’à une dizaine de minutes à pied de sa GuestHouse « Papillon Villa ». Je m’y rends. Alors que j’y arrive, un clébard sort de je-ne-sais-où et me gniaque derrière le genou droit. Il me blesse légèrement. Ça pisse un peu le sang mais rien de grave. Après cette frayeur, je suis accueilli par une jeune femme parlant très bien français. Je lui explique mon problème. Malheureusement, cette auberge de jeunesse est également complète ce soir. Sa maman, Cathy, arrive. Finalement, elle me propose un endroit dans un dortoir où elle m’installera un matelas. C’est parfait. Je réserve une nuit en plus pour vraiment recharger les accus. A 10$ les 2 nuits, c’est presque cadeau.

En parlant de Nico, on s’est raté d’un cheveu hier. Nous avons dû nous croiser sur une route parallèle alors que j’arrivais, et lui en partait, sur la capitale. Mais, comme je roule souvent sans réseau pour économiser la batterie de mon iPhone ou que le réseau ne passe pas très bien dans la pampa (c’est comme la wifi … LOL !), on s’est catché trop tard. « Chacun sa route, chacun son chemin. Chacun son rêve, chacun son destin. » comme le chante si bien Tonton David.
Il est midi passé. J’ai grave les crocs. Je trouve un restau fréquenté uniquement par des autochtones. J’y engloutis une belle assiette de riz frit au bœuf. Puis je rentre à l’auberge où la dynamique proprio m’installe un coin pour y siester. Ensuite, je pars à la recherche d’un café pour me poser, écrire et lire. Comme dans beaucoup d’endroits un peu cosy, le mobilier est en bois massif fabriqué notamment dans ces usines aperçues en descendant le Mékong.

Enfin, en ce 1er avril, je tenais à dédicacer cette journée à ma grande sœur Momo qui fête aujourd’hui ses 70 ans. Je n’arrive d’ailleurs pas à l’imprimer. C’est grâce à elle que j’ai commencé à m’entraîner « sérieusement » alors que je m’installais sur Blagnac. Cela remonte à 1992. Que de belles soirées passées dans leur maison de Beauzelle à taper dans les murs, et aussi boire de bons coups, avec son mari Alain. Que de franches rigolades lors de nos entraînements, courses et cross et bien sûr après courses avec toute la joyeuse bande de l’ASPTT Toulouse Athlétisme. Que de bons moments passés avec leurs enfants Elise et François devenus de beaux adultes. Que de beaux souvenirs …