J153 – lundi 1er mai – Lak Sao / Phô Châu (VN)

En ce 1er mai, ce ne sera pas la Fête du Travail pour moi. J’ai mon taf à accomplir. Je me lève donc comme d’hab’ à 5h30 et à 6h00, je suis dans les starting-blocks. Je vous fais remarquer que j’ai arrêté mon film « Un jour sans fin ». Mais, ça y ressemble un petit peu quand même sauf que les décors et les personnages changent tous les jours. Donc ce matin, j’ai un gros chantier qui m’attend avec le franchissement d’un col pour passer la frontière vietnamienne.

Par contre, en ce 1er mai, toutes les gargotes sont fermées. J’ai fini mes 2 bananes restantes mais ce ne sera pas suffisant pour cette étape. Je prends la route et je trouverais bien quelque chose à manger sur la route. Je quitte donc Xayyo Hôtel situé au pied de la montagne. A ce sujet, je n’ai toujours pas saisi la différence entre certains hôtels (comme celui-ci) et les GuestHouse.

J’emprunte la route 8 et me dirige vers le nord-est. La frontière de Nam Phao est à 33 kms.

Mais avant d’attaquer la journée, avant que je n’oublie et avant de quitter le Laos, je vous présente les billets de ce pays. Le billet de 1 000 kips présente le That Luang, redevenu symbole national, les nouvelles armoiries du pays et trois jeunes femmes appartenant aux ethnies majoritaires : hmongs, lao et kha. (té face en bas à droite).

Côté pile
Côté face du président Kaysone Phomvihane (1920-1992)

Une fois la ville quittée, je me retrouve à nouveau dans la campagne laotienne. Pour contredire ce que j’écrivais hier, les brûlis ont été enlevés pour faire place à de futures cultures, probablement du magnoc comme il y en a beaucoup ici.

Je traverse un plateau enserré dans les montagnes. La terre y est riche et les cultures nombreuses. Il est 7h00 et le soleil commence sa course quotidienne. Lui aussi ne fêtera pas le 1er mai. Cependant, la fraîcheur est encore présente alors que nous sommes à 600 mètres d’altitude. Je sors à nouveau mon coupe-vent.

Je longe le torrent Nam Phao qui prend source dans ces montagnes. La route est agréable et déserte en ce lundi matin. Par contre, je commence à avoir les crocs mais je ne trouve aucune gargote ouverte dans les rares villages que je traverse. Seules quelques boutiques vendent paquets de chips, de bonbons et de gâteaux.

Comme la route commence à s’élever, il faut impérativement que je bouffe quelque chose au risque de me payer une hypoglycémie dans la montée. Je m’arrête dans une de ces boutiques pour y acheter quelques paquets de gâteaux secs. Ils sont conditionnés par 6. J’en prends 4. J’espère que ça tiendra. Je ne trouve aucune banane non plus. Peu avant 8h00, je passe devant une friche couverte de déchets. Mais, c’est surtout le mur qui m’interpelle.

Et oui, forcément, en voyant ce prénom inscrit sur ce mur, j’ai une grosse pensée pour mon petit frangin Emmanuel appelé Manu. Nous sommes une fratrie de 4 garçons : Yves-Marie l’ainé né en 1960 et marié avec Florence, parents de Valérian et Hugo, moi en second père de Gwendoline et Titouan, Franck né en 1964 marié avec Corinne et parents d’Eloïse qui se marie en août et donc le Manu né en 1968 vivant avec Stéphanie et père de Zoé qui se mariera l’année prochaine. Et pour l’anecdote, mon grand-père maternel faisait aussi partie d’une fratrie de 4 garçons (Alphonse, Eugène, Maurice notre grand-père et André). Je sais que mes frangins, belles-sœurs, neveux et nièces me suivent dans mes périples. J’en profite pour vous envoyer de gros bisous à toutes et tous. Et vous dire aussi que je vous aime 🥰. Je ferme la parenthèse. Après une longue grimpette à travers la montagne, j’arrive à 8h30 à la frontière laotienne que je passe sans encombre.

L’endroit est assez lugubre. Tous les hameaux croisés en montant ont les maisons fermées. Le poste frontière est couvert de moisissure. La route est défoncée sur les derniers hectomètres. Je n’aimerais pas franchir cette frontière sous la pluie ou de nuit. Ce doit être flippant. Je franchis ensuite le traditionnel no man’s land entre les 2 pays mais aussi une méga flaque d’eau en bas avant de monter un mur …

… pour arriver au poste frontière du Vietnam. Celui-ci est beaucoup plus imposant. Mais, comme du côté laotien, il n’y pas grand monde. Tant mieux. Dans la montée, je n’ai croisé que quelques trucks perdus sur ces petites routes.

Comme souvent à ces postes frontière, je suis baladé d’un bureau à l’autre par un personnel accueillant, charmant et sympathique. J’ai l’impression d’être une boule de flipper que l’on envoie, avec le plus grand mépris, d’un bumper. Je garde mon calme et une attitude neutre. Je finis par obtenir mon tampon. Mais quelle bande de cons ! Avec leur petit pouvoir que leur confère le droit d’apposer ou pas un tampon sur un bout de papier, cela doit les amuser et les faire jouir ces peigne-culs. Cela ne me réconcilie pas avec les cons. Je finis par retrouver Dame Nature. Elle, au moins, n’est pas décevante comme l’Homme.

Par contre, la route est en travaux en haut du col de Nape Pass situé à 722 mètres. Je passe dans un sacré bourbier. Haka2 sera bon pour passer à la douche cet après-midi. Ensuite, la route est bitumée mais sur quelques kilomètres seulement. Puis, jusqu’en bas de la descente, c’est un vrai chantier dans tous les sens du terme. Des travaux de consolidation de la route côté précipice rendent les passages difficilement praticables. Je descends debout pour amortir un max les chocs et les mains sur les freins. Je finis les avants-bras et les mains tétanisés et les jambes et le cul couvert de boue. Il n’y a pas que Haka2 qui va devoir passer à la douche …

Arrivé dans la vallée, le paysage est toujours aussi superbe avec cette végétation luxuriante qui n’a pas encore été cramée. Je longe cette fois-ci le torrent Song Ngàn Phó. Par contre, je ne trouve aucun café d’ouvert dans les villages traversés. Étonnant. Je rêve d’un café da.

Je finis par trouver enfin mon bonheur dans la grosse bourgade de Tây Son. Je me pose et retrouve la saveur du café vietnamien après mon périple à travers le Laos.

Après cette pause bien venue et de bienvenue, je reprends la route QL8A direction plein est vers la mer. Je retrouve ces larges boulevards sur lesquels flotte le drapeau vietnamien. Le vent vient à nouveau de la mer et me souffle dans les bronches. Je n’ai toujours rien mangé de solide. Je commence à avoir sérieusement les crocs. Il me reste encore une petite dizaine de bornes avant d’arriver à Pho Chau qui sera finalement le terme de cette étape. Bien que je sois sur la réserve, cela devrait tenir.

La campagne vietnamienne est aussi verdoyante que la laotienne. Cela me change sacrément de mes paysages arides du centre laotien. Les rizières sont prêtes à être moissonnées alors qu’un buffle se charge de désherber les champs alentour.

Un peu plus loin, je passe devant un cimetière au pied de pistes de ski. Sur la droite, je distingue une belle piste rouge et, sur la gauche, de jolies pistes vertes. Quant à moi, cet hiver aura été sans ski et sans raquette. Mais bon, pour le ski, cela ne manque plus trop. Je préfère la solitude de longues balades en raquette sur de la neige vierge. En parlant de neige, j’ai mon train avant floconneux. Comme sur le pneu arrière, j’ai une crevaison lente sur le pneu avant. Décidément. Rien ne vaut les pneus Schwalbe. Je m’arrête et regonfle au max. J’espère que cela va tenir jusqu’à la ville.

A midi passé, j’entre enfin en ville. Je repère un endroit où beaucoup de scooters sont posés. J’y intercale mon vélo. Il y a plusieurs tablées de jeunes qui picolent de la bière en mangeant des morceaux de porcs cuit au barbecue. Cela me donne envie. Comme j’ai faim, je commande aussi du riz. La serveuse m’apporte 2 bières au cas où. C’est gargantuesque mais je finis toutes les assiettes. Je vais bien roupiller dès que j’aurais trouvé un hébergement. Cependant, en repartant, le pneu avant est bien dégonflé.

A quelques encablures se trouve le Backpacker Hôtel. Parfait pour moi. Pour le pneu, cela tient. Je pose Haka2 qui harassé comme moi. Je me pose aussi. Je verrai pour le pneu avant après ma sieste.

Une fois que j’ai bien récupéré, j’attaque la réparation. Comme pour le pneu arrière, c’est un morceau de limaille qui s’est incrusté dans le pneu. J’arrive à l’extraire en m’aidant d’une pince à épiler que j’ai retrouvé dans ma trousse de toilette. Toujours avoir une pince à épiler avec soi ! Je peux réparer mais il faut urgemment que je trouve de nouvelles chambres à air. Ici, il n’y a aucun magasin de vélos. Après avoir lavé mon destrier, je pars me balader en ville. Le spectacle est partout notamment sur ce trottoir où quelques maraîchères vendent leur récolte.

Je pars ensuite m’acheter un sandwich banh mi que je mangerai accompagné de ma seconde bière. Il est 18h30. Le soleil se couche dans les nuages. En ce 1er mai, je n’ai pas chômé. J’ai parcouru une relativement courte étape de 85 kms mais avec 1200 mètres de D+ et 1700m de D- mais ô combien compliqués. Avant de plier les gaules, je vous montre le tracé de mon parcours laotien. Je sais qu’il y en a parmi vous qui sont friands de ces traces.

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